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jeudi 12 janvier 2006

King Kong et la vierge brugeoise

sur King Kong de Peter Jackson (2005)

par Jérôme

Au premier plan à droite gisent plusieurs Français ;
on reconnaît à gauche la figure de Jan Breydel.
Dans la marge de droite planent deux putti portant les éperons d’or ;
dans celle de gauche figurent Dame Fortune et la vierge brugeoise.
Au sommet, le cercle se referme par deux anges qui tiennent
la couronne de laurier au dessus du lion.

Bert Cardon et Bart Stroobants,
l’Iconographie de la bataille des Eperons d’or,
Fonds Mercator, Anvers, 2002

I

J’ai une amie belge qui m’a expliqué que “ping pong” se prononçait “p-i-ng” + “p-o-ng” et non “p-i-ng” + “p-on-g”.

— J’en ai marre des belges de la Cité U ; le seul truc qu’ils trouvent à faire, le soir, c’est de jouer au ping-pong

— Au quoi ?...

— Au ping-pong… Ça saoule de trop… C’est pour ça qu’on va tout le temps Chez Georges

C’était au Mondrian, près de la place de l’Odéon. Le serveur venait de lui apporter un chocolat viennois.

— Il a l’air louche, le chocolat…

— Mets un peu plus de crème, peut-être…

— On va voir…

Je n’avais jamais réfléchi qu’il était absurde de prononcer “p-i-ng” + “p-on-g”. Du coup j’ai admis immédiatement qu’elle avait raison. En plus c’est une descendante de Jan Breydel, un des acteurs de la bataille des Eperons d’or, qui, le 11 juillet 1302, vit la victoire de la “piétaille du plat pays” contre l’élite de la chevalerie française.

— Tu te souviens d’une grande statue, sur la Grand Place, à Bruges ?

— Non…

— C’est mon ancêtre… Jan Breydel... Et il y a même un stade qui porte son nom… Je te la montrerai, la statue, si tu veux…

Il faudra surtout que je lui demande un jour de me chanter « Frère Jacques ». Je suis curieux de voir comment elle prononce « Ding ! Ding ! Dong ! ». A mon avis, “d-i-ng” + “d-i-ng” + “d-o-ng”, ce qui est charmant.

— Alors ?...

— C’est pire… Regarde le goût que ça a…

— Aaah… Je crois que tu avais mis trop de crème, en fait !…

Aux côtés de Jan Breydel, la fronde belge était animée par le chevalier zélandais Jean de Renesse et le tisserand Pieter de Coninc. Coninc, prononcé “Con-i-nc”, ressemble à König, qui en allemand veut dire “roi”. Pieter de Coninc devint ainsi “Pierre le Roi”, et on raconte que les parisiens crurent que les Brugeois voulaient couronner un fabriquant de tissus !

— Et King Kong, tu prononces ça comment, toi ?

K-i-ng K-o-ng, bien sûr… Ton “K-i-ng K-on-g” à la française, franchement, ça fait vraiment trop con… Tiens d’ailleurs il y a un remake de Peter Jackson qui va sortir, tu savais ?

— Un remake de K-i-ng K-o-ng ??? Non ???

C’était en juin dernier. Si elle n’était pas repartie en Belgique finir son mémoire sur la présence des marques déposées et les stratégies publicitaires dans les longs métrages, nous aurions pu aller voir King Kong ensemble.

II

La première fois que j’ai vu King Kong, j’avais été terrorisé par plusieurs choses. D’abord par le battement inquiétant des tam-tams, par lequel se sentait la présence angoissante des autochtones, leur humeur changeante et la préparation de leurs rituels incompréhensibles. Ensuite par le silence de celui qui s’était lové dans le bateau, et qui, avec un art consommé du rapting, avait enlevé la belle actrice blonde sans que personne ne s’en aperçoive. Et puis cette offrande de la femme, et ce gros doigt effeuillant délicatement ce qui lui restait de robe blanche ! Et enfin cette facilité incroyable avec laquelle Kong pouvait changer de taille, passant sans qu’on s’en rende toujours compte de six à soixante-douze mètres !

Alors quelle ne fut pas ma déception en allant voir le King Kong de synthèse de Peter Jackson. Pas de tam-tams angoissants, mais une vieillarde lépreuse susurrant des paroles filtrées de 27 effets électroniques. Pas de rapt invisible, mais un champion olympique de saut à la perche confondant Skull Island avec Pékin 2008. Pas de gros doigt de la Bête déshabillant la Belle, mais une jongleuse de cirque nous faisant un intermède comique pour charmer son gros benêt de gorille. Mais surtout j’ai bien regardé, et Kong a exactement la même taille du début à la fin du film : sur l’île, dans le théâtre et sur le sommet de l’Empire State Building : exactement la même taille !… Et je parie que s’il nous l’avait montré dans le bateau, il aurait réussi à lui conserver toujours la même taille !!!

Et puis Peter Jackson se trompe tout le temps de film. Il aurait du écrire sur ses lunettes KING à gauche et KONG à droite. Ça lui aurait évité de se mettre à nous faire un remake du documentaire L’Amérique a faim : images tristes et touchantes de la Grande Dépression ; un remake de Cannibal Holocaust II, les sauvages ont l’air malades mais ils ont toujours aussi faim ; un remake de Jurassic Park VII, encore plus de grosses bêtes se vautrant les unes sur les autres ; un remake de Sexy Ugly XVII, le prépuce baveux contre le pubis à griffes ; un remake de Billy Billy et la chasse aux gorilles, une aventure en chansons pour toute la famille et un remake de le Seigneur des anneaux IX, on crie au ralenti mais on n’entend pas le cri, à la place une musique émouvante, ça fait un effet chouette.

III

Elle a une bosse sur le front, au dessus de l’œil gauche.

— Tu as vu ce que je me suis fait avant-hier en sortant de Chez Georges ?...

— Tu es tombée ?

— Oui… J’étais avec Kyoko et on est tombées toutes les deux… Tu aurais vu ça, un vrai massacre… Ça saigne vachement en plus, à cet endroit… Elle, elle boitait… Aucun taxi n’a voulu nous prendre… On a dû rentrer à la Cité U à pieds !...

jeudi 5 janvier 2006

Attention au monstre! (il est assis à côté de toi)

Nous sommes enfin allé voir King Kong, un peu tard, certes, mais que voulez vous, les vacances de Nowell n'ont pas été des plus reposantes, et pour une fois, le cinéma a dû attendre. C'est tout de même dans la joie que nous avons pris la Pinpinmobile (à l'épreuve des balles, et tout et tout, comme la vraie!) pour nous rendre dans le multiplexe-de-la-mort d'à côté.

Mauvaise surprise, déjà une petite salle pour Kong... Dommage, il faut croire que le public d'ici n'a pas eu trop envie de suivre. Deuxième mauvaise surprise, la salle est déjà bien remplie quand nous y arrivons. Damned! Mon siège préféré est utilisé par un Jordan, moins de 6 ans, qui disparaît derrière un tonneau de popcorn. Tsss... Nous finissons par trouver trois sièges vides et apparemment accueillants. De gauche à droite, nous nous installons : Le Léonard, Isacui, et moi-même.

Marrant, le type à côté de qui je m'installe est au milieu de la rangée, seul.

Tout seul.

Alors que la salle est désormais presque pleine.

Je comprends vite pourquoi.

A peine assis, je suis déjà sur Skull Island, avec les machins-pas-jolis-qui-sentent-pas-bon-mais-alors-pas-du-tout : mes narines sont assaillies par une odeur de vieille crasse, la crasse ignoble et adipeuse. Le contenu de mon estomac fait mine de partir en vacances ("ah ben ouais, c'était nul chez nous, il y avait des pluies acides") , mais je le tance vertement et me concentre tel un vrai djidaille pour oublier les effluves effarantes du vilain monsieur. Histoire de me changer les idées en attendant le début du flim, j'observe les environs : beaucoup de jeunes, très jeunes spectateurs : les moins de 10 ans ne sont pas rares. Les parents sont fous.

A lier.

La première bande annonce donne le ton : La Crypte. Ca a l'air d'être un aimable nanar claustro. J'espère que les parents ont apprécié et qu'ils sauront expliquer à la marmaille pourquoi la dame avait l'air d'avoir si peur et pourquoi il y avait un machin à-z-ailes derrière le monsieur. Moi je voulais voir The Descent d'façon.

Aaaah, Le flim commence... Youpi, Kong! (Entre temps, une dame est venue s'asseoir à la droite de monsieur Méphitique. Erreur, ma p'tite dame!)

Comment c'était? Pas un chef d'oeuvre, assurément, mais passé la première heure (durant laquelle rien de bien intéressant ne se passe, malgré une évocation assez réussie de la Grande Dépression), c'est parti pour les montagnes russes jusqu'à la fin... Un très bel hommage à l'original, en tout cas.

Et puis un retour aux sources pour Peter Jackson lors de la scène des insectes, parfaitement immonde. C'est pendant cette scène que le cuistot (interprêté par Andy Serkis) rencontre ce qu'on ne peut définir que comme des pénis-à-gland-plein-de-dents et qu'Isacui m'a glissé à l'oreille ces quelques mots : je te hais, tu vas me le payer. J'espère que suite à cette scène, les parents du petit Jordan, moins de six ans, ont pu passer une bonne nuit. Sincérement. Parce qu'avec la mauvaise mort du cuistot et le popcorn qu'il s'est enfilé, ça n'a pas du être facile...

Moi? Ca s'est bien passé, Isacui ne mange pas de popcorn!