A propos de Sixth Sense de M. Night Shyamalan

"-I see dead people
- when ?
- All the time"

Tiens, vous je ne sais pas, mais moi j'aime bien lire les critiques de films. J'aime bien en écrire aussi, à l'occasion, mais là n'est pas le propos. Des fois, les critiques, c'est cool. Les journalistes prennent mille précautions pour ne pas trop déflorer le sujet, pour garder un élément de surprise. Surtout quand il y a un coup de théâtre final. Souvenez vous, Usual Suspects. Bonheur intense. Sauf que là, en lisant ces critiques, j'ai lu à quel point le coup de théâtre final était inattendu, à quel point il était merveilleusement futé et génial.

Et c'est vrai. C'est une excellente chute. Le problème, c'est que sachant que la fin allait le surprendre, le pinpin qui me sert de cerveau (qui d'habitude se laisse gentiment bercer par le rythme des films, se laisse porter par l'histoire et va de révélations en révélations avec un sourire béat coincé dans ses circonvolutions grisatres) s'est amusé à chercher le moindre indice pendant les 12 premières minutes. Après 12 minutes, il avait tout compris, et au lieu de garder ses conclusions pour lui, il s'est servi de son interface utilisateur pour me pourrir le film. Pour ça, on peut dire qu'elle est au point, cette interface. Au bout de 12 minutes, c'est à peine si je ne voyais pas des ronds rouges autour des indices contenus dans le film. Et cette voix dans ma tête qui disait : "Toune, ce flim est excellent, mais je vais te le pourrir. C'est con, mais ça me fait plaisir."

Voilà comment on se fait pourrir un film (il y a aussi Marie-Pierre, ma collègue, qui a voulu imiter une vieille dame au théâtre et a bouffé plein de bonbons enrobé de papier qui crépite. Elle paiera cher cette forfaiture.). Ceci dit, le Sixième Sens est tout à fait excellent. C'est un flim qui sait prendre son temps pour faire peur. Un flim qui s'insinue lentement. Un flim qu'on déguste, pas un flim qu'on vous enfonce dans la tête avec un maillet. On n'y voit que très peu d'effets spéciaux, il n'y a pas de "plans à la De Palma". Juste des images qu'on retient instantanément en vue de futurs cauchemars : Une fille qui vomit, terrifiée, un ballon rouge qui monte lentement vers le plafond, des pendus aux yeux vivants. Non, franchement, même Bruce Willis y est excellent. Je ne dis pas qu'il est nul d'habitude, je dis juste que la dernière fois que je l'ai vu en psy, c'était ridicule (Color of Night, le premier qui rit a perdu. T'as perdu, Xave). Là, il est juste parfait en homme brisé. On a également beaucoup parlé du gamin et je ne peux que confirmer. Il y a un je-ne-sais-quoi de perdu dans son regard, un je-ne-sais-quoi qui me fait dire que je n'en voudrais pas comme voisin de peur qu'il empoisonne mon chat avant de se pendre avec les intestins encore chauds d'icelui.

Enfin, plus cette critique avance et plus je me rends compte que je ne peux pas dire sur ce film tout ce que j'ai en tête à son sujet. Après tout, ne serait il pas mal venu de la part de Toune-ki-se-fait-pourrir-le-flim de se venger bassement en vous racontant comment, par exemple, Sommersby est pendu à la fin ? Non, ça n'est pas mon genre. Je voudrais juste vous parler d'un petit bout d'intrigue secondaire. Et là je m'adresse avant tout à ceux qui ont vu le sixième sens. Je voulais vous parler de cette cassette vidéo. Vous situez ? Non ? Rappelez vous le moment où vous vous êtes dit: "Non, je ne veux pas croire à ce que j'imagine. Je refuse catégoriquement que ce flim continue. Je veux qu'il s'arrête. Ce malaise ne peut continuer." Ce moment où malgré tout vous êtes resté. Vous je ne sais pas, mais moi j'y pense encore tous les soirs. Tous les soirs je vois ce mini-théâtre.

Tous les soirs j'ai peur.