Pinpinonline

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

dimanche 19 décembre 1999

La Jeanne d'Arc du Luc Besson

A propos de Jeanne d'Arc de Luc Besson

Par Sylve

Je suis allée voir ce film avec un à priori que je qualifierai de "positivo-négatif". Pourquoi? Parce que le personnage de Jeanne d'Arc m'a toujours intéressé, mais que je n'ai jamais apprécié le cinéma de Luc Besson. Un français qui joue à l'américain tout en se revendiquant cinéaste de la France pour les français qui franchouillardisent, moi je dis "beurk". Mais bon, là n'est pas mon propos.

Jeanne d'Arc, donc. J'ai tout de suite pris peur en assistant au spectacle navrant d'une Jeanne D'arc enfant, proprette, dévalant des collines, façon générique de "la Petite Maison dans la Prairie". Je m'attendais à voir arriver le chien des Ingalls. De plus, en plein moyen âge, en Lorraine, voir à la même saison des champs de blé noir bien mûr, de colza, de coquelicots, et de lavande, ça me fait un peu rire. Le prétexte des jolies couleurs et tout le côté cul-cul que ça peut trimballer accentuent justement ce début mielleux, ridicule, ponctué de "c'est merveilleux", "hihi", et autres "haha". Cela partait donc bien mal.

Arrivent alors les vilains anglais qui font du mal à notre gentille Jeanne d'Arc nationale. Ils sont là dépourvus de nuance, sales, cruels, sans la moindre pitié, et nécrophiles. Pour parfaire ce charmant tableau, leurs dents à la "Visiteurs" montrent que l'on est bien passé de la guimauve du début à une bien plus dure réalité. Justement, la vie de tous les jours devait être bien dure à cette époque, certes oui. Ce qui ne va pas dans le film, c'est le côté "youpi tralala" du début et tout à coup la tragédie, le drame, l'intolérable quand les anglais arrivent. Un peu cliché tout ça. C'est le moins que l'on puisse dire.

Le mot est laché. Cliché. Tout le film n'est qu'une (très) longue suite de clichés.

La mystique Jeanne d'Arc
Celle qui reconnaît son dauphin au milieu de la cour à Chinon. Pas fière pour un sou en plus. Non, au contraire, très humble et d'une ferveur qui force l'admiration de tous dans l'assistance.

Jeanne la guerrière
Solide comme un roc. Même pas mal quand elle reçoit des flèches. Surtout très courageuse. Elle soulèverait des montagnes, pense-t-on. Et elle le fait. Elle pense même à des stratégies que de grands niais de soldats expérimentés n'ont pas été fichus d'imaginer. Au milieu de ça, les anglais sont forcément arrogants et ridicules.

Jeanne ou la torture mentale
A la fin d'une bataille, une fois l'enthousiasme et la volonté de vaincre disparus, vlà-ty-pas que la Jeannette se rend compte que la guerre blesse, tue, massacre, et que les gens saignent. Un peu plus et elle se tuerait pour se punir.

La trahison de Jeanne
Ses pairs la renient, sa foi aveugle est incomprise. J'en passe et des meilleures. Bref, droite et fière, elle préfère être condamnée plutôt que de se soumettre au dogme de l'église d'alors. Quel ourage! Quelle foi pure et juste! La voilà donc sacrifiée, car après quelques péripéties, elle est livrée aux (vils) anglais.

Si vous voulez mon avis, Jeanne a plutôt été sacrifiée sur l'autel de la mode que par les anglais dans ce film. Jeanne d'Arc de Luc Besson est en effet un film à la mode. L'héroïne est plus vulnérable que le bête héros de base, le sang coule à flot, les gens ne sont pas toujours très propres et se tiennent mal; cette façon de filmer est très actuelle et se veut proche d'une certaine réalité. Tout cela ne cache pas un scénario finalement très conventionnel. Même les "voix" de Jeanne d'Arc n'inventent rien. La veille même de cette projection, j'assistais à celle de Fight Club, pour ne citer qu'un film où ce genre d'hallucination se produit

Enfin voilà La véritable Jeanne a souffert, je vous l'accorde, mais qu'est ce que j'ai souffert en voyant celle de Luc Besson!

mercredi 8 décembre 1999

Let's make an early night, dear...

A propos de When the Wind Blows de Jimmy T Murakami

"Ils s'éveillent à l'heure du berger
Pour se lever à l'heure du thé
Et sortir à l'heure de plus rien"

Jacques Brel

When the Wind blows est un chef-d'oeuvre. Si. Mais j'entends déjà des voix s'élever dans les ténèbres, de l'autre côté de mon écran:

"Mais, notre bon Toune, ce flim que tu décris comme un chef-d'œuvre, nous n'en avons jamais entendu parler. Et pourtant on aime bien aller voir les chef-d'œuvres. On est même allé voir 2001 à sa sortie, c'est dire."

Je sais. Ce film, on n'en a pas entendu parler. Et pourtant il n'est pas si vieux (il date de 1986). Le seul problème de ce film est ce qu'on appelle communément dans le langage cinéphilique tounien: "l'excès de réalisme glauque" (Je sais, ça peut paraître un peu pompeux comme ça, mais ça l'est. J'aime bien être un peu pompeux). Et là les voix derrière l'écran s'insurgent:

"Mais, notre gentil Toune, qu'entends tu par excès de réalisme glauque? Et puis d'abord, il cause de quoi ton chef d'œuvre? Et puis, c'est qui les acteurs?"

Ah oui, j'allais oublier ces détails. Il ne s'agit pas d'un film classique. Non, il s'agit d'un dessin animé. Un dessin animé que vous ne montrerez JAMAIS à vos enfants si vous voulez passer des nuits tranquilles. Un dessin animé au dessin naïf. A l'image des deux personnages principaux. Deux personnes agées. Un vieux couple. Jim et Hilda. Qui vivent dans un charmant petit cottage au cœur du Sussex La situation est grave. Le monde est au bord de la guerre nucléaire. Mais nos deux paisibles vieillards ne sont pas trop inquiets. Après tout, ils ont déjà vécu une guerre. Et des bombardements. Et puis avec l'aide du petit manuel de survie édité par le gouvernement, ils sauront se préserver.

Sauf qu'ils sont naïfs. Tragiquement naïfs. Ils vont faire montre de la plus extrème des prudences. Celle qui aurait pu les sauver pendant le blitz. Une prudence qui leur sera fatale.

Quand la bombe explose, environ vingt minutes après le début du film, le réalisateur nous balance l'une des scènes de destruction les plus horribles de l'histoire. Oubliez la pittoresque scène de fin du monde de Terminator 2. Juste bonne à vous filer un vilain froid dans le dos. Celle-ci est plus insidieuse. Moins directement frappante. Mais elle fait partie de celles qui reviendront vous hanter.

Et puis tout est terminé. Tout est gris. Tout est mort. Sauf Jim et Hilda. Qui voudraient reprendre une vie normale. Et qui la reprennent. Pour bientôt être victimes des premiers symptômes. Des premiers maux de tête. De la première fatigue.

Jusqu'au bout, ils resteront fidèles à leurs petites habitudes de vie. Ils vivront. Jusqu'au bout. Petites taches pastel dans un monde gris. Avant d'être absorbés.

C'est un peu pour ça que ce film est oublié. Il est un peu comme ses héros involontaires. Isolé. Perdu dans le train train d'une mort assurée. Sans coup de théâtre, ce qui avait été annoncé arrive. Sans heurt. Au milieu des souvenirs d'une vie rendue meilleure par le temps. D'une vie finalement sans éclat. Un film qu'on ne veut qu'oublier. Parce qu'on ne veut pas savoir ce qui arrive quand on boit l'eau de pluie du jour d'après.

Malheureusement, on ne peut oublier un tel film. Et c'est pour ça que personne n'en parle jamais. Parce que même le film le plus pessimiste ne peut vous préparer à ce choc.

"Let's make an early night, dear..."

"Toune, merci de nous donner envie de voir des flims. Nous allons immédiatement nous mettre à l'opérette."