A propos de Star Wars Episode 1 The Phantom Menace de George Lucas

J'ai 6 ans et mes parents m'emmènent au cinéma. Ca n'est pas la première fois, et je ne garderai pas de souvenir très précis de cette séance. Mais après ce film, ma vie ne sera plus jamais la même. Elle sera emplie de Dark Vador, de D2R2 et de 6PO. Pour toujours.

Une critique?

On ne peut pas faire la critique de "the Phantom Menace" de la même manière qu'on critiquerait le premier blockbuster venu. Starwars tient une place un peu particulière dans l'histoire du cinéma. Films cultes parmi les films cultes, les trois épisodes existant font partie intégrante de la vie du cinéphile, qu'il soit fan ou non. Alors pour le fan de base, l'annonce de l'arrivée d'un nouvel épisode une quinzaine d'années après "Return of the Jedi" a fait l'effet d'une panne de pacemaker. La pierre philosophale allait arriver et tout bouleverser sur son passage. Darth Vader allait devenir humain l'espace de quelques heures pour tomber du côté obscur et provoquer des frissons cataclysmiques chez les spectateurs. Ce que bon nombre de fans avaient oublié, c'est qu'Anakin Skywalker avait été enfant.

L'histoire?

C'est l'histoire de cet enfant doté d'immenses pouvoirs qu'il ne fait que soupçonner que nous raconte le film. Un enfant pur qui va faire connaissance avec le mal. Un enfant pur dont la chute est discrètement annoncée. Suffisamment discrètement pour que l'on croit, l'espace du film, que tout va bien. Que tout ne peut que bien se passer. Car c'est bien là l'un des sens du titre du film: la menace réelle n'existe pas encore, et seules quelques petites pièces du puzzle se mettent en place. Quelques pions sur l'échiquier.

Les personnages?

Ces pions nous sont longuement présentés, comme il se doit au début d'une saga. Obi Wan Kenobi, jeune apprenti du maître Qui Gon Jinn. La Reine Amidala. Le Sénateur Palpatine. Anakin. Tous sont interprêtés avec talent. Je ne m'étendrai pas sur les qualités de chacun, à l'exception de Jake Lloyd qui incarne le petit Anakin. Je crains les enfants au cinéma comme on craignait la peste au moyen âge. Dans la salle, ces charmantes têtes pleines de cheveux se gavent de popcorn, hurlent, pleurent, vivent sans s'apercevoir qu'il se passe quelque chose sur le grand écran devant eux. Sur l'écran, ils surjouent, et ne sont là que pour émouvoir ma tante. Rares sont les gamins de cinéma qui m'ont ému. Jake Lloyd en fait partie. Bien sûr, dans certaines scènes, il est juste correct, sans plus. Mais, et pour prendre un exemple précis, une certaine scène d'adieu m'a brisé le cœur. Et c'est vrai, j'ai pleuré.

Emotion?

J'ai pleuré trois fois pendant ce film, ce qui est un bon score pour un Starwars. Rappelons que "A New Hope" ne m'a fait pleuré que 2 fois, "The Empire Strikes Back" 4 fois, et "Return of the Jedi" 1 fois. Une scène toute simple m'a touché plus que de raison, par sa simplicité même: un C3PO tout jeune et "tout pelé" fait la connaissance de R2D2. Magique. Un moment de bonheur total. Les autres moments sont plus liés au mal et à l'histoire proprement dite, aussi je ne vous gâcherai pas le plaisir.

Le côté obscur?

Le mal. La peur. La colère. La haine. Darth Maul. Le mal est puissant. Le mal vient de se réveiller. Le mal sera le maître mot de cette nouvelle trilogie. Même s'il n'a pas encore atteint toute sa puissance, celle qu'il sera nécessaire de déployer pour corrompre Anakin, le mal a posé ses jalons, s'enracine dans les cœurs. L'espace de deux duels, Darth Maul vole le film. Quasiment muet, il devient la mort noire et rouge. Mythologique. Anthologique. Maul vous happe. C'est un chien de guerre. Une machine à tuer du Jedi. Avec la Force pour alliée. Lors du deuxième duel, les gros plans consécutifs sur les visages des protagonistes inscrivent illico la scène parmi les plus réussies de la saga. Et parmi les plus tragiques.

"le personnage le plus irritant jamais porté à l'écran"

Jar Jar Binks. Personnage virtuel. Maladroit. Drôle. Parfois moins. Jar Jar n'est pas l'épouvantail annoncé. Bien sûr, il n'est là que pour détendre l'atmosphère, mais pour un public jeune, il est un ajout nécessaire. Pour un public moins jeune, il n'arrive pas tout à fait à dissimuler les sous-entendus crépusculaires du film. Oui. Crépusculaires. La fin de l'ancienne République s'annonce. Embourbée dans ses complots et sa lourde bureaucratie, la République se meurt. Sur les planètes les plus éloignées règnent déjà les barons du crime. Sur Tatooine on organise des courses meurtrières.

"Speed? C'est mou."

Les scènes d'action de Starwars ont toujours été fabuleuses. "The Phantom Menace" ouvre de nouvelles perspectives. La course de Pod se hisse quasiment au niveau de la poursuite en voiture de Bullit. Avec des engins improbables. Et des montées d'adrénaline qui vous laissent épuisé. La grande bataille spatiale, même si elle rappelle très fortement celle de "Return of the Jedi", est rondement menée. Mais les scènes les plus impressionnantes sont ailleurs. Les duels sont l'essence même d'un bon épisode de Starwars. Les duels de l'Episode 1 envoient les précédents aux oubliettes. Rapides. Très rapides. Violents. Extrêmement violents. Secs comme une gorge dans le désert. Darth Maul, Qui Gon, et Obi Wan sont au sommet de leur puissance. Et on le sent à chaque image.

"Et qu'est ce que tu en as pensé en fait?"

Pas que du bien au début. Passé le premier quart d'heure, je me suis demandé si oui ou non on allait arriver à quelque chose. Et puis, miracle. Tout se met en place. La saga est lancée. Tout est prêt. Les quarantes dernières minutes sont parfaites. George Lucas a réussi son pari. Rendre intéressante, voire passionnante une histoire dont la conclusion ne fait aucun doute.

J'ai 27 ans. Je sors du cinéma. Depuis mes six ans, Dark Vador est devenu Darth Vader, 6PO est devenu 3PO. J'en sais beaucoup sur ces films, et parfois, à force, la magie retombe un peu. Mais pour le moment, je ne rêve que de sabre laser à double lame, de Gungans, de Jedi. Un bon café. Oui, un bon café. Voilà ce qu'il me faut.