A propos de Jeanne d'Arc de Luc Besson

Par Sylve

Je suis allée voir ce film avec un à priori que je qualifierai de "positivo-négatif". Pourquoi? Parce que le personnage de Jeanne d'Arc m'a toujours intéressé, mais que je n'ai jamais apprécié le cinéma de Luc Besson. Un français qui joue à l'américain tout en se revendiquant cinéaste de la France pour les français qui franchouillardisent, moi je dis "beurk". Mais bon, là n'est pas mon propos.

Jeanne d'Arc, donc. J'ai tout de suite pris peur en assistant au spectacle navrant d'une Jeanne D'arc enfant, proprette, dévalant des collines, façon générique de "la Petite Maison dans la Prairie". Je m'attendais à voir arriver le chien des Ingalls. De plus, en plein moyen âge, en Lorraine, voir à la même saison des champs de blé noir bien mûr, de colza, de coquelicots, et de lavande, ça me fait un peu rire. Le prétexte des jolies couleurs et tout le côté cul-cul que ça peut trimballer accentuent justement ce début mielleux, ridicule, ponctué de "c'est merveilleux", "hihi", et autres "haha". Cela partait donc bien mal.

Arrivent alors les vilains anglais qui font du mal à notre gentille Jeanne d'Arc nationale. Ils sont là dépourvus de nuance, sales, cruels, sans la moindre pitié, et nécrophiles. Pour parfaire ce charmant tableau, leurs dents à la "Visiteurs" montrent que l'on est bien passé de la guimauve du début à une bien plus dure réalité. Justement, la vie de tous les jours devait être bien dure à cette époque, certes oui. Ce qui ne va pas dans le film, c'est le côté "youpi tralala" du début et tout à coup la tragédie, le drame, l'intolérable quand les anglais arrivent. Un peu cliché tout ça. C'est le moins que l'on puisse dire.

Le mot est laché. Cliché. Tout le film n'est qu'une (très) longue suite de clichés.

La mystique Jeanne d'Arc
Celle qui reconnaît son dauphin au milieu de la cour à Chinon. Pas fière pour un sou en plus. Non, au contraire, très humble et d'une ferveur qui force l'admiration de tous dans l'assistance.

Jeanne la guerrière
Solide comme un roc. Même pas mal quand elle reçoit des flèches. Surtout très courageuse. Elle soulèverait des montagnes, pense-t-on. Et elle le fait. Elle pense même à des stratégies que de grands niais de soldats expérimentés n'ont pas été fichus d'imaginer. Au milieu de ça, les anglais sont forcément arrogants et ridicules.

Jeanne ou la torture mentale
A la fin d'une bataille, une fois l'enthousiasme et la volonté de vaincre disparus, vlà-ty-pas que la Jeannette se rend compte que la guerre blesse, tue, massacre, et que les gens saignent. Un peu plus et elle se tuerait pour se punir.

La trahison de Jeanne
Ses pairs la renient, sa foi aveugle est incomprise. J'en passe et des meilleures. Bref, droite et fière, elle préfère être condamnée plutôt que de se soumettre au dogme de l'église d'alors. Quel ourage! Quelle foi pure et juste! La voilà donc sacrifiée, car après quelques péripéties, elle est livrée aux (vils) anglais.

Si vous voulez mon avis, Jeanne a plutôt été sacrifiée sur l'autel de la mode que par les anglais dans ce film. Jeanne d'Arc de Luc Besson est en effet un film à la mode. L'héroïne est plus vulnérable que le bête héros de base, le sang coule à flot, les gens ne sont pas toujours très propres et se tiennent mal; cette façon de filmer est très actuelle et se veut proche d'une certaine réalité. Tout cela ne cache pas un scénario finalement très conventionnel. Même les "voix" de Jeanne d'Arc n'inventent rien. La veille même de cette projection, j'assistais à celle de Fight Club, pour ne citer qu'un film où ce genre d'hallucination se produit

Enfin voilà La véritable Jeanne a souffert, je vous l'accorde, mais qu'est ce que j'ai souffert en voyant celle de Luc Besson!