à propos de Hana-Bi de Takeshi Kitano

- Eh, les amis! Y a Hana-Bi qui passe ce soir sur Arte! Il y a trois T noirs dans Télérama! Vous vous rendez compte! Quelqu'un l'enregistre pour moi?
- Ben, si tu veux, Hélène, j'en profiterai pour le regarder. Trois T noirs, quand même. C'est pas tous les jours.

C'est sur un rythme très lent que se déroule la tragédie de monsieur Nishi, vue à travers les les yeux de Takeshi Kitano. Nishi est flic. Il a longtemps négligé sa famille à cause de son métier. En ce jour, un collègue réussit à le convaincre d'aller rendre visite à son épouse qui se meurt doucement d'une leucémie. Nishi accepte, et son collègue reste seul en planque devant l'immeuble où habite un assassin. Bien sûr, il se fait abattre. Il survivra à ses blessures, oui, mais passera le restant de ses jours dans un fauteuil roulant, abandonné par sa femme et sa fille, comme on abandonne une voiture en panne, au bord de la route.

Le métier de flic ou la famille. C'est le choix qui est proposé aux personnages d'Hana-Bi. Le seul choix possible.

Nishi, après toutes ces années passées à exercer son métier avec passion et violence, finit par choisir sa famille, ou ce qu'il en reste. Il assumera son choix jusqu'au bout. Puisqu'avoir choisi de donner le dessus à sa famille a brisé la vie d'un de ses collègues, il ira jusqu'à l'issue forcément terrible de son paradoxe, et son chemin sera parsemé d'éclairs de violence à mesure qu'il s'enfoncera plus profond dans les eaux sombres de sa nouvelle vie. Tandis qu'il offre d'ultimes et charmantes vacances à son épouse mourante, la violence se fera de plus en plus présente, de plus en plus pressante.

Car c'est bien là toute la problématique d'un flim où l'on se demande si, finalement, pour assumer sa vie de famille, un policier ne doit pas se tourner d'une certaine manière vers le crime.

Un flim sans issue, où ceux qui choisissent le célibat meurent, où ceux qui choisissent leur boulot finissent seuls, et où ceux qui enfin finissent par se donner à leur famille...

-Alors, t'as regardé?
-Moui.
-T'en as pensé quoi?
-Ben, euh, c'est un peu divinement chiant, quand même. Dans le même genre, j'ai préféré
Heat, tu vois?
-Mais, c'est pas du tout le même genre!
-Ben si, en quelque sorte, parce que vois tu...
-Ah non! Il n'y avait que deux T noirs dans Télérama!